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lundi 15 avril 2013

Longtemps j'ai pensé pouvoir retrouver l'amour

Longtemps j'ai pensé pouvoir retrouver l'amour.

Tantôt je l'imaginais musicienne. Disséquer avec elle sans fin un morceau, l'écouter faire ses gammes, l'admirer jouer sur scène, frissonner en la voyant réajuster une mèche derrière l'oreille avant d'entamer un solo. Suivre ses mains courir sur un piano, voir sa joue posée sur un violon, serrer entre ses jambes une contrebasse...

Tantôt je la voyais aventurière, me tirant par la main aux quatre coins du monde, me poussant d'un avion, hurlant en tirant sur la poignée du parachute, je nous voyais assis en tailleur sur une roche polie, contemplant en silence un coucher de soleil flamboyant le visage maculé  d'une boue séchée, sa tête sur mon épaule.

Tantôt  j'étais certain que c'était une intellectuelle que je cherchais. Plongeant sans vergogne dans les affres de la métaphysique, elle ne trouvait pas le répit en me rejoignant le soir, excitée  par un concept quelle voulait partager, un débat quelle voulait prolonger. Le soir nous nous faisions la lecture dans le lit, je la regardais les yeux brillants d'admiration.

Tantôt c'était une chienne. Nous nous enfoncions sans vergogne dans les fantasmes que les Bourgeois délurés ne pouvaient imaginer, faux décomplexés pourris de préconçus, retirant les barrières pour les disposer juste  un peu plus loin... Nos corps étaient deux mécaniques célestes complémentaires, deux composés chimiques nécessaires à une même réaction chimique.

Un tailleur strict, une dentelle émouvante, une culotte et un maillot blanc, un jean, des talons aiguilles vertigineux, des chaussures indiennes, un maquillage lourd, des lèvres naturels, une queue de cheval, les cheveux courts, une voix grave, des paroles douces, un rire cristallin sans retenu, des baisers  doux et langoureux, une bise qui claque, une langue qui file, une bouche qui s'ouvre où je me perds...

Tant de temps pour me rendre contre que c'était une seule et une même  personne que je cherchais, une particule d'antimatière, un double, une chimère. Tant d'années pour comprendre que l'esprit fabrique des êtres qui n'existent pas, repoussant sans cesse les frontières du possible, objet de frustrations inextinguibles. 

Pourquoi donner autant de valeur à la durée dans une relation ? N'y a-t-il pas de bons moments  fugaces ? Pourquoi s'extasier sur une relation dans laquelle on s'épuise ? Fallait il que je vive dans des mondes parallèles pour trouver le bonheur ? Qui avait il d'inexcusable de trouver en chacune d'elles  une part d'absolue ?

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